Tokyo Ska Paradise Orchestra – Diamond in Your Heart – Cutting Edge
UN PEU D’HISTOIRE : Le Tokyo Ska Paradise Orchestra, groupe nippon emblématique de la scène ska japonaise qu’on ne présente plus, avait sorti deux albums l’année dernière. Le premier en mars 2012 s’intitulait Walkin’ et le second en novembre 2012 au doux nom de Desire.
Toujours composé de neuf musiciens au talent monstrueux, le groupe a tourné énormément au Japon mais aussi ailleurs, notamment au le 12 avril dernier au Coachella Valley Music and Arts Festival à Indio en Californie et huit jours plus tard au 420 Fest à Guadalajara au Mexique. On a pu visionner ces concerts (à défaut d’y être réellement allé) et on a récupéré l’intégrale audio dans une qualité des plus correctes. Au-delà d’avoir toujours une performance scénique au top du top, cela a permis de découvrir des morceaux inédits que le groupe n’avait encore jamais dévoilés parmi toute la palanquée de leurs disques.
Et comme on pouvait s’y attendre, les Tokyoïtes ont sorti le 03 juillet 2013 un nouvel album avec tous ces morceaux en son sein. On l’a écouté et réécouté et on vous en parle maintenant. C’est parti !
L’ALBUM : Il existe une édition CD ainsi qu’une édition limitée contenant le CD et un DVD relatant leur Walkin’ Tour 2012, et plus particulièrement un show du 06 juillet 2012 au Second gymnase de Yoyogi dans le quartier de Shibuya à Tokyo (un complexe énorme paraît-il). Faute de moyen, la rédaction de Rude Boy Train ne s’est procurée que l’édition CD toute simple. Mais qu’à cela ne tienne, on se rattrapera et on vous parlera sans doute bientôt du DVD également. Une chose reste cependant une énigme, pourquoi le groupe ne sort-il pas de version vinyle de chacun de ses nouveaux albums ?! L’album a été enregistré dans les mythiques studios hollywoodiens de EastWest Studios.
Que dire de ce nouvel album. Un titre à l’eau de rose pour un album qui n’en est pas moins me direz-vous ? Eh bien vous auriez incontestablement tort. Au menu on retrouve seulement huit titres. Eh ouaip, on devient fainéant également chez les japonais, la crise est décidément partout… Mais qu’à cela ne tienne, les huit titres sont d’une qualité certaine, et quelques uns sont d’ailleurs des tueries absolues qu’il vous faudra absolument entendre sous réserve de passer à côté de quelque chose de grand !
Parmi ces huit morceaux, cinq sont des compositions originales. Je vais donc commencer par parler de ces titres. On commence par la chanson titre Diamond in Your Heart. Le groupe a invité Takeshi Hosomi à y poser sa voix. Pour rappel, ce petit gars est le chanteur et guitariste de Hiatus, un groupe de rock progressif nippon (en tant que grand amateur de rock progressif, je ne peux que vous recommander d’aller jeter une oreille plus qu’attentive à Hiatus). On pourrait dire de ce premier morceau qu’il serait parfaitement adapté à un opening (générique de début) de Naruto Shippuden ou de Fairy Tail par exemple. Les japonais sont de grands adeptes de ce genre musical, et même s’il est vrai que le TSPO s’en sort relativement bien, avec énergie, punch et style, on regrettera cette orientation plus que douteuse (et c’est pourtant Takashi Kato, le guitariste prodige, qui l’a composé). Heureusement le reste se rapproche plus de ce qui a fait le succès du groupe.
LA Traffic revient aux sources et est un morceau bien rock avec un rythmique ska clairement affirmé. Attention à vos oreilles, ça dépote. Le thème composé par Gamo fracasse tout sur son passage (comme pour montrer une haine envers la circulation à L.A. ?), les solos de sax. baryton et de trombone sont à couper le souffle et puis c’est tout. Bref on en redemande !
S’en suit Dizzily Dazzled, une merveille écrite par Oki Yuichi. Alors ce n’est toujours pas du ska mais ça permet d’entendre tous les talents du clavériste. Le mec se prend à jouer trois solos avec un orgue Hammond, puis un synthétiseur (exactement le même son qu’on peut entendre sur le morceau My Baby Rooster du groupe sorti en 2006 sur l’E.P. Hoshifuru Yoruni).
On enchaîne avec le morceau bien ska trad. de cet album, à savoir Skactus. Écrit par Tsuyoshi Kawakami, on y retrouve un thème bien prenant, et surtout une section rythmique de toute beauté. Le batterie est métronomique, et le jeu de basse est un chef d’œuvre de ce qui peut se faire en la matière. Bien des bassistes de ska devraient s’en inspirer je pense. Avec une ambiance un peu dark, notamment lors des solos de trombone et de clavier, le morceau étonne par son originalité et sa réalisation. On applaudit, on dit « wahou ! » et on redemande avec un plaisir fou.
On termine ces compositions persos avec Rockabilly Cuttie. Bien que perceptible, le côté rockabilly est bien moins présent que chez Roddy Radiations & The Skabilly Rebels par exemple. Logique, ce n’est pas ce qu’on demande au TSPO. Et qui d’autre que le guitariste pouvait nous pondre un tel morceau… Alors dans l’ensemble c’est du très haut niveau, mais je trouve que l’enregistrement en lui-même manque de pêche et de dynamisme. C’est fort dommage car on tient là un morceau assez énorme, surtout quand le tromboniste s’amuse et s’éclate en jouant seul avec une sourdine sur fond de roulements de tomes de la batterie.
Passons maintenant aux trois reprises. Je ne vais pas les reprendre dans leur ordre d’apparition car je garde le meilleur morceau de l’album pour la fin (et oui il s’agit d’une reprise !). On commence avec Aruanjez. Comme son l’indique, on a affaire ici à une reprise du merveilleux concerto pour guitare et orchestre écrit par Jaoquín Rodrigo en 1939. Si la musique d’un autre temps vous émerveille, alors vous connaissez forcément le concerto. Pour les autres, allez voir des vidéos sur YouTube et écoutez quelques mesures. Du coup ce n’est pas la version du TSPO qui fait dans la finesse vous imaginez bien. La petite intro à la trompette est ma foi fort sympathique. Avec une rythmique très two-tone, notamment le jeu de la basse, les solos de trompette et de sax. ténor sont bien cool, bien agressif comme il faut. À plusieurs reprises le groupe calme le jeu puis repart de plus belle. L’effet est plutôt réussi. Mais ce morceau est à retenir surtout pour le talent de Takeshi Kato. Si vous pensiez qu’il ne savait jouer que de la guitare électrique, et bien vous aviez tort. Il joue ici merveilleusement bien de la guitare classique, et avec une aisance et une dextérité qui en ferait rougir plus d’un…
On continue avec You’ve Got a Friend in Me. Morceau bien connu des petits comme des grands enfants puisqu’il n’est ni plus ni moins que la chanson d’introduction de Toy Story écrite et interprété par Randy Newman. Alors dans le cas présent ça reste un ska sympathique, mais sans plus. Ça dure moins de 2 minutes 30. Je pense qu’il s’agissait juste là d’un clin d’œil et rien de plus. Le tromboniste est quand même cool (mais ça tout le monde le savait déjà).
Enfin on termine par le tube de cet album, le morceau qu’on écoute encore et encore sans jamais ne s’en lasser ! Le groupe s’est attaqué à un monument de l’histoire du rock : Born to Be Wild de Steppenwolf ! Et je peux vous assurer qu’écouter cette version du TSPO, bien que très différent de l’originale du groupe de rock canadien et, ce faisant, de Easy Rider, est d’une efficacité redoutable !! Rien que l’intro aux claviers est monumentale. Tu l’écoutes et tu te dis que ça flaire bon le morceau absolu. L’orchestration et les arrangements sont sublimes et les solos de claviers énormissimes ! Même Kin-Ichi Motegi au chant fait preuve d’une maîtrise certaine pour une fois. Je ne peux que finir ma chronique en parlant donc de ce morceau, qui deviendra à ne pas douter une référence dans le genre, et une référence pour le TSPO.
Le Tokyo Ska Paradise a sorti son album de l’année 2013. Si certains morceaux sont un peu trop timides ou d’un goût certainement douteux, d’autres en revanches méritent vraiment qu’on achète le disque. J’irai même jusqu’à dire que Born to Be Wild mérite à lui seul qu’on fasse l’acquisition de cet album. Bref, achetez-le, écoutez-le, savourez-le et partagez-le autour de vous car peu de disques sont aujourd’hui d’une telle qualité…
Maxime