Rude Boy Train

Madness – One Step Beyond – (Stiff Records 1979)

Madness_One_Step_Beyond« Rude Boy Train’s Classics », c’est une série de chroniques d’albums qui ont marqué l’histoire du ska, du rocksteady ou du skinhead reggae. Standards objectifs reconnus par le monde entier ou chefs d’oeuvre personnels qui hantent nos jardins secrets, la rédac de Rude Boy Train vous fait découvrir ou redécouvrir ces albums majeurs qui méritent d’avoir une place de choix sur vos étagères ! Rendez-vous le premier vendredi de chaque mois… 

UN PEU (BEAUCOUP) D’HISTOIRE:   L’année 2016 marquera les 40 années d’existence de Madness. C’est donc peu de dire que l’on s’attaque là à un monument de la musique britannique. Originaire de Londres et plus précisément de Camden Town (le détail a son importance) le groupe se forme donc en 1976 autour Mike Barson (« Barso »), Chris « Chrissy Boy » Foreman, Lee « Kix » Thompson et Chas Smash (de son vrai nom Cathal Smyth), tout d’abord sous le nom de « The Invaders ».

En janvier 1979, après l’arrivée de Graham « Suggs » McPherson, Mark Bedford et Dan Woodgate, le combo adopte le nom de Madness, en hommage à Prince Buster et son célèbre titre « Madness (is gladness) » (1961). D’ailleurs le premier single de Madness sera un cover  de Prince Buster, intitulé The Prince sorti sur le label Two-Tone. Toujours en 1979, le groupe quitte le label a damiers de Jerry Damners pour Stiff Records, label mythique d’une époque ou l’on retrouve la crème du mouvement punk (The Plasmatics, The Damned, Nick Lowe, The Adverts…) puis de la « new wave » (The Pogues, Lene Lovich, Elvis Costello & the Attractions, Ian Dury & the Blockheads…) ! La signature de Madness sur le label n’est pas sans intérêt et apportera à Stiff Record le succès et des retombées financières plus que conséquentes. Un premier single « Al Capone » sort courant 1979 avec en face B une nouvelle reprise de Prince Buster « One Step Beyond ».

L’album du même nom sort en novembre 1979 et connaît immédiatement le succès. Emblématique du mouvement Two-Tone au même titre que les Specials, les Selecter et autres The Beat, Madness incarne le renouveau de la musique ska et permet le découverte ou la redécouverte du patrimoine musical jamaïcain lié notamment à la culture rudeboy. Même si le groupe évoluera à partir de 1983 vers des sonorités plus « pop », il n’en demeure pas moins l’incarnation de toute une époque liée à cette seconde vague musicale référence ultime pour un grand nombres de groupe se réclamant de l’influence du combo de Camden Town.

Entre séparations, reformations et de changements de line-up, Madness ne cessera d’évoluer tout en gardant vivaces les influences fondatrices du groupe, preuve en est l’album « The Dangermen Sessions Vol. 1 », album de reprise sorti en 2005 avec notamment des covers de Prince Buster, Max Romeo, Desmond Dekker, Bob Marley & The Wailers ou le dernier album en date « Oui Oui Si Si Ja Ja Da Da » sorti en 2012.

LE DISQUE :  Le premier album de Madness sort donc en novembre 1979 chez Stiff Records. Le groupe a tout pour plaire, un saxo ravageur et gras à souhait, un chanteur plus sexy que Ian Dury et un répertoire qui, entre blagues potaches, reprises et compos persos, vous donne le tournis sans vous laisser le temps de reprendre votre souffle. L’album s’ouvre sur l’ultra planétaire « One Step Beyond » le titre de Prince Buster revisité avec un talent frisant l’arrogance ou la voix de Chas Smash devenu légendaire annonce la couleur pour un single (le second de l’album) qui sera numéro 1 en France durant 8 semaines et reste le 45 tours (comme on disait au siècle dernier) le plus vendu dans l’héxagone en cette année 1980 (plus de 720 000 exemplaires en 10 mois -mars à décembre 1980 !!!) ! My Girl, un des titres le plus pop de l’album, fait la part belle au piano pour un solo d’anthologie sur une rythmique ska où la voix de Suggs répond au saxo de Lee Thompson. « Night Boat To Cairo », avec sa ligne de basse empruntée aux « Gangsters » des Specials et son intro au saxophone baryton râpeux, imitant la corne de brume d’un bateau, est un hommage plein d’humour aux films en noir et blanc pour un single qui trouvera rapidement sa place dans le top 10 des charts anglais de l’époque. A noter que le morceau reste le premier enregistrement du groupe avec une section de cordes.

« Believe Me » certainement le morceau le moins « ska » de l’album, un peu dans la continuité de « My Girl », fait également la part belle au piano pour un morceau là aussi très pop autour d’un solo de sax laissant éclater tout le talent de l’ami Lee Thompson. Land of Hope and Glory, titre two-tone par excellence entretien le rythme effréné de l’album. « The Prince » reste peut-être comme l’hommage le plus abouti du groupe  à Prince Buster, l’influence majeure du groupe. Premier single de l’album, le morceau revisité par Lee Thompson restera plus de 11 semaines dans les charts anglais atteignant la 16ieme place pour un titre devenu marquant, si besoin était, l’attachement du groupe à la musique jamaïcaine avec son célèbre  « Buster, he sold the heat, with a rocksteady beat » ! Avec Tarzan’s Nuts le groupe se fait plaisir donnant libre cours a son esprit potache et déconneur. Le morceau est un des cinq titres de l’album écrit par le clavier Mike Barson (avec Cathal Smyth) et fait référence, là aussi, aux séries TV en noir et blanc et bien sur au film avec Johnny Weissmuller.

Avec « In The Middle Of the Night », qui commence par la voix de Suggs ou se joignent rapidement le reste des instruments, le groupe donne dans la ballade avec l’histoire d’un voleur passionné par les sous-vétements féminins… humour noir comique pour un morceau qui permet au groupe de revendiquer ses origines sociales. Suggs affirmera d’ailleurs pour l’occasion que Madness est le Pink Floyd de la classe ouvrière. L’intro de « Bed & Breakfast Man » sonne très brit-pop avant l’heure et aurait probablement mérité d’être un des singles de l’album. Dans la même veine, le très pop « Razor Blade Alley » est le premier morceau chanté en solo par Lee Thompson. Avec son piano très « jazzy » et Suggs à l’orgue le titre s’inspire du film de Sidney J. Furie « The Boys in Company C » sorti en 1978.

Swan Lake est bien évidemment l’adaptation skaifiée (j’ose) du célèbre morceau de Tchaïkovsky qui avait déjà eu un petit succès en 1969 interprété par le groupe ska The Cats et fait la part belle au piano de Mike Barson. Morceau instrumental, il permet, lors des concerts du groupe, la mise en place d’une chorégraphie devenue depuis légendaire. Le titre « Rockin’ In A Flat » porte parfaitement son nom. Titre aux contours rockabilly emprunté à Johnny & The Hurricanes et son « Beatnik Flyer », il permet la fusion improbable des Teddy Boys  avec les  fans traditionnels du groupe. Avec « Mummy’s Boy » le ska reprend ses droits. Le titre, selon Lee Thompson, définit assez bien musicalement le concept « Nutty Boy » développé par le groupe « moitié fête foraine, moitié music-hall » !

Avec (They Call It) Madness, le groupe rend un nouvel hommage à Prince Buster avec cette reprise, composition du bassiste Mark Bedford, qui incarne parfaitement le son Two-Tone. Je vous laisse, là aussi, apprécier le saxophone décapant de Lee Thompson ! Dernier titre, « Chipmunks Are Go! » est un morceau vocal qui refermait traditionnellement les concerts du groupe. Le titre, qui ne présente aucun intérêt particulier, fut imposé par le producteur de l’album Clive Langer (avec Alan Winstanley) pour clôturer l’album.

Avec « One Step Beyond » Madness inaugure une nouvelle vague musicale. Hommage à une culture revisitée avec talent, l’album marquera durablement toute une génération et influencera profondément celle qui suivront…. Simplement essentiel et indispensable !

 

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