Rude Boy Train

Tokyo Ska Paradise Orchestra – Desire (欲望) – Cutting Edge/Revolution Recordings

 

On vous parlait de la venue de ce disque il y a un mois dans une news.

On ne présente plus le TOKYO SKA PARADISE ORCHESTRA ! Ce groupe issu de la capitale de l’archipel nippon est sans conteste ce qui se fait de mieux en matière de ska et de ska/jazz à l’heure actuelle.

Pour résumer, le groupe a été fondé en 1985 par le percussionniste Asa-Chang (qui le quittera en 1993). Un premier mini-album éponyme sort en 1989. Bien que perfectible, ce dernier laisse augurer un avenir radieux pour le groupe. On connaît la suite… quasiment un album par année avec à chaque fois certains morceaux d’une classe folle et d’un style propre qui fait des ravages !

Et c’est le 14 novembre (eh oui, on suit l’actualité de très près à Rude Boy Train) qu’est sorti Desire, leur nouvel album. Du coup comme je suis un fan inconditionnel du combo tokyoïte, je n’ai bien évidemment pas résisté à l’idée de vous en faire une chronique. C’est parti !

LE DISQUE : Tiens, il peut paraître étrange de voir le TSPO sortir deux albums la même année (n’oublions pas que leur précédent opus Walkin’ est sorti en mars dernier seulement) et c’est d’ailleurs la première fois que cela se produit. Qui plus est avec les activités de certains musiciens dans leurs autres projets respectifs (le bassiste, le tromboniste et le trompettiste dans Tsuyoshi Kawakami & His Moodmakers, le percussionniste dans Palillos Redondos ou le batteur dans So Many Tears), on aurait pu s’attendre à ce que cet album ne vienne pas tout de suite. Et pourtant n’allez pas croire qu’il a été composé et réalisé dans la précipitation. Je pense que ces musiciens sont arrivés à un tel niveau qu’ils peuvent se permettre d’enregistrer aisément deux albums dans la même année sans perdre pour autant en qualité.

On commence fort avec la première invitée mentionnée sur la pochette du disque, à savoir Yoshie Nakano. On a déjà pu la retrouver sur le précédent album du groupe dans le morceau Tate Gaki no Ame. Pour la petite histoire, elle est la chanteuse du jazzband Ego Wrappin’. Si vous ne connaissez pas, allez y jeter un œil et y tendre une oreille ! Sur l’album qui nous concerne ici, on retrouve cette belle et talentueuse chanteuse sur le premier morceau Tasogare wo Asobu Neko (qu’on pourrait traduire par « Le chat qui joue au crépuscule »). Ça fait plaisir d’entendre un morceau aussi abouti dès le début ; c’est du ska comme seuls les Skapara savent en faire. Ça swingue, ça groove, c’est hyper bien réalisé, mais surtout quelle voix ! Les solos de saxophone et de trompette arrivent à point nommé et sont de toute beauté. On accélère le tout vers la fin et on obtient une première pépite de cet album (et vous allez voir qu’il y en a quelques unes au compteur).

On enchaîne avec Hijousen Toppa, un morceau bien plus agressif que le précédent. La section rythmique prend une place importante, et la section cuivre se fait également bien plus entendre. C’est énergique, et on a droit à une palanquée de solos en tous genres (trompette, saxophone baryton, claviers et enfin guitare pour clôturer).

On continue avec Wild Cat, sans doute le morceau de cet album que je préfère. Incontestablement bien plus jazzy que ska, il vous plaira à coup sûr si vous êtes fan de jazz survitaminé à la sauce nippone. Si le solo de guitare laisse une impression de déjà vu dans d’autres morceaux du groupe sur leurs derniers albums, ce n’est vraiment pas le cas de celui de piano. Oki Yuichi est un fou furieux, et il trouve des idées de génie dans ses solos. Quelle claque musicale on prend lorsqu’on écoute une telle dextérité et une telle aisance dans le jeu d’un instrument ! La suite du morceau est somme toute assez classique, même si le ralentissement du tempo en toute fin permet de laisser les cuivres s’amuser un peu pour donner un final des plus excquis… Wouahou !

Tasihita Yatsu est un bon ska trad. simple mais redoutablement efficace avec des solos de trombone et de saxophone ténor plutôt calmes et sympathiques. Un vrai régal pour nos petites oreilles d’amateurs de ska.

On passe à un son beaucoup plus funky sur Midnight Buddy. Pour vous donner une idée de la sonorité du morceau, on se rapproche de ce que le groupe a fait avec le morceau Open Your Eyes sur l’album Answer de 2005. Et comme un tel morceau appelle forcément un agitate-man (et que le groupe n’en a plus depuis le départ de Hiyamuta Tatsuyuki en juillet 2008), on a fait directement appel à Mister Dennis Bovell en personne pour jouer ce rôle. Il y pose ses cris et ses vocalises à la perfection. À noter qu’on trouve des solos de percussions et de trombone joués avec brio.

Le morceau d’appel de cet album est sans aucun doute Rushin’. C’est celui que vous avez pu entendre sur le premier teaser de l’album que le groupe avait mis sur Youtube. C’est aussi réussi, rapide et énergique que le morceau Boppin’ Bunny issu de l’album World Ska Symphony que vous pouvez entendre au début de certaines de nos émissions (je ne serais pas surpris si notre ami Lionel mettait ce morceau en introduction des émissions Rude Boy Train).

Et là on arrive au morceau que j’apprécie le moins, et ce même si Dennis Bovell est invité au chant. Il faut toujours que le TSPO nous ponde un morceau à l’air niais et au ras des pâquerettes. Il a fallu que ça tombe sur (There’s No) King of the Ants. Certains aimeront le côté bon enfant et la voix de Dennis Bovell (bien qu’elle ait plus mal vieilli que celle d’un Jimmy Cliff par exemple), mais Atushi Yanaka ferait quand même mieux de rester au saxophone baryton, instrument avec lequel il excelle, plutôt que de venir poser sa voix sur un morceau.

Amis de l’émotion, vous allez adorer le morceau Old Grand Dad. S’il s’agit de ska trad. bien posé, je trouve qu’il se dégage quelque chose de ce morceau, un peu à l’instar de The BIG MAN Still Standing de l’album Full-Tension Beaters. Les solos de bugle, trombone et piano complètent parfaitement l’émotion débordante du morceau. C’est juste beau et ça s’écoute allongé en fermant les yeux et en oubliant tout, notamment grâce à une fin dub style…

Pour couper un peu le tout, un interlude musical de 44 secondes fait son arrivée.

Là vient un morceau qui commence par une intro guitare, basse, batterie et claviers. Shugyou est un bon morceau de ska comme le TSPO a l’habitude de nous en fournir. Le thème est original, et le premier solo de saxophone ténor met dans l’ambiance. Et là, alors qu’on aurait pu s’attendre à ce que le morceau continue tel quel, une cassure forte intervient et Atushi Yanaka te balance un solo de saxophone baryton des plus expérimentaux dans ta face (et bim !). Quelle énergie et quelle créativité dans ce groupe, tous leurs albums me surprendront toujours je pense.

On passe au morceau The Other Side of the Moon. Une petite intro style western spaghetti et on attaque. Une particularité de ce morceau est que le batteur joue sur sa caisse clair sur le contretemps et non sur le temps fort. Ce faisant, lorsque l’on a l’habitude d’écouter de la musique jamaïcaine, on se trouve que ce morceau dérange un peu. Mais une fois cette caractéristique mise de côté, on prend plaisir à écouter et réécouter ce qu’on peut qualifier de réussite. J’aime beaucoup le solo de piano qui rappelle fortement la musique traditionnelle japonaise (bah oui, on n’en oublie pas pour autant ses racines lorsque l’on fait de ska quelque part).

Sasurai Forever est un morceau entièrement joué au piano (avec quelques rares interventions de saxophone à un niveau sonore très faible). Rien à voir ici avec du ska ou du jazz. On se rapproche plus de la musique classique de l’époque du XVIIIème siècle. On peut ne pas aimer, mais on ne peut pas dire que ce soit moche. Disons que pour faire une comparaison avec un pianiste actuel, on pourrait dire que cela ressemble à certains morceaux de Baptiste Trotignon (un pianiste de jazz français qui a fait des très très bons albums en solo).

Arrive la petite touche d’humour musicale du TSPO. Skan-Can est, comme son nom l’indique si bien, une version ska de Can-can. Pour rappel, ce morceau composé par Jacques Offenbach (un français svp !) est tiré de l’opéra Orphée aux Enfers de 1858. C’est d’ailleurs bien plus tard qu’il a été utilisé pour danser le french can-can, une danse totalement inconnue à l’époque pour Offenbach. Bon alors qu’on se le dise tout de suite, ce morceau ne révolutionne en rien l’album mais avouons qu’il est vraiment drôle de pouvoir enfin écouter une version ska de ce chef d’œuvre.

L’album se termine avec la chanson Taiyou to Shinzou (qui signifie « Le soleil et le cœur »). C’est sur ce morceau qu’on retrouve le troisième et dernier invité de l’album, le chanteur Hanaregumi. Il s’agit d’un guitariste chanteur qui joue dans un style folk et rock et parfois jazzy. Le morceau en lui-même est sympathique, redonnant le moral à quiconque l’aurait perdu !

En conclusion, voilà un album rempli de bonnes surprises musicales. Remarquez, on n’en attendait pas moins du Tokyo Ska Paradise Orchestra. Tout n’est pas forcément bon à prendre, mais il y a néanmoins des morceaux de haut niveau et d’une qualité que personne ne pourra remettre en question. On trouvera dommage que l’intervention de Dennis Bovell se fasse de cette manière, mais on appréciera à côté de ça les autres invités.

Il y a des groupes où la sortie d’un nouvel album est toujours un événement majeur, et le TSPO n’y échappe pas. S’il y a bien un groupe à retenir en ce moment, c’est celui-ci ; et s’il y a bien un album à se procurer et à écouter de toute urgence, c’est bel et bien l’album Desire (欲望) !

À noter que l’album est également disponible en édition limitée. Il s’agit d’une pochette de vinyle (mais sans vinyle à l’intérieur !) avec quelques artworks en son sein. De ce fait, l’édition limitée est à peine plus chère que l’édition normale.

Maxime

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Tokyo Ska Paradise Orchestra – 黄昏を遊ぶ猫 (Tasogare wo Asobu Neko) (feat. Yoshie Nakano) [audio:http://www.rudeboytrain.com/wp-content/uploads/2012/11/Tokyo-Ska-Paradise-Orchestra-Tasogare-wo-Asobu-Neko.mp3]

Tokyo Ska Paradise Orchestra – Wild Cat [audio:http://www.rudeboytrain.com/wp-content/uploads/2012/11/Tokyo-Ska-Paradise-Orchestra-Wild-Cat.mp3]

Tokyo Ska Paradise Orchestra – Old Grand Dad [audio:http://www.rudeboytrain.com/wp-content/uploads/2012/11/Tokyo-Ska-Paradise-Orchestra-Old-Grand-Dad.mp3]

Tokyo Ska Paradise Orchestra – 修行 (Shugyou) [audio:http://www.rudeboytrain.com/wp-content/uploads/2012/11/Tokyo-Ska-Paradise-Orchestra-Shugyou.mp3]

Tokyo Ska Paradise Orchestra – Skan-Can [audio:http://www.rudeboytrain.com/wp-content/uploads/2012/11/Tokyo-Ska-Paradise-Orchestra-Skan-Can.mp3]

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