Rude Boy Train

Freetown – Swimming The Atlantic – Numen Records

SWIMMING THE ATLANTIC cover artUN PEU D’HISTOIRE: FREETOWN n’est pas ce qu’on peut appeler un groupe de djeun’s. Depuis le début des années 90, le combo basé à Londres taille la route trimballant dans ses valises du ska, du rocksteady et du reggae. Pendant longtemps, le combo emmené par Steve Harris a surtout été l’un des principaux backing-band de Laurel Aitken, avec qui ils enregistrent « Rudy Girl » pour la compilation largement distribuée en 1997, « Ska Island ». Et lorsque le Godfather tombe malade, Freetown se met à accompagner des vieille gloires toujours vertes comme Alton Ellis, Derrick Morgan, Dave Barker ou Winston Francis…

Ça n’est qu’en 1999 que le groupe signe son premier album, « Painless », pour le label américain Beatville Records, avec Rico Rodriguez en guest au trombone, le tout enregistré au studio Ariwa de Mad Professor. Dès l’année suivante, Freetown remet le couvert avec « Easy Street », un second album, autoproduit cette fois. Depuis, plus grand chose de visible dans nos contrées.

C’est donc avec un plaisir non dissimulé que l’on a appris la sortie fin septembre de « Swimming The Atlantic », troisième album de Freetown, avec Eddie « Tan Tan » Thornton (Aswad, Jazz Jamaica, Ska Cubano, Kitty, Daisy & Lewis) en guest de premier choix à la trompette.

LE DISQUE: Comme ça de prime abord quand on jette une oreille pas très attentive au nouvel album de Freetown, ce groupe british avec un nom de capitale africaine pas très démocratique, on trouve que ça sonne moderne. Sauf que non, ça ne sonne pas roots, mais ça ne sonne pas moderne non plus. En fait ça sonne eighties. A fond. Quelque part entre certains tubes FM de UB40 et « Today’s Specials », l’album nineties des faux Specials qui sonnait comme s’il avait été enregistré vers 89 par le producteur des Fine Young Cannibals. Du reggae et du ska tendance variétoche pour les financiers de la City qui sniffent de la coke et vont manger chez Jamie Oliver.

Et oui, sauf que dans le son 80’s de UB40, rétrospectivement, on se rend compte qu’il y avait pas mal de bonnes choses. Et que Freetown a su garder le meilleur.

La première partie de l’album est très bien négociée, avec une habile ouverture sur « Only In Tour Head », rocksteady très FM, très mainsteam, pas rugueux pour un rond, sucrée comme une pomme d’amour avec ses houhou et ses sifflements de pipeau, mais tout à fait appréciable, puis « Sometimes » qui commence on ne peut plus bizarrement avec un drôle de phrasé entre hip-hop et ragga, mais qui au bout de quelques mesures a la bonne idée de se transformer en un superbe ska  très pop, un peu à la Hotknives d’il y a vingt ans, et ça, c’est tout ce que j’aime ! Juste après, « Freedom Fights » se veut plus posée, plus sérieuse, moins dansante mais tout aussi dense, extrêmement bien arrangée, et toujours aussi FM. L’instru « Ziggy » part ensuite dans une direction assez déroutante, un peu à l’image un peu plus loin d’une adaptation très post-coloniale de la « Sabre Dance » d’Aram Khachaturian.

On appréciera tout particulièrement l’imparable flow de « King Drummer », la finesse de sa construction, la simplissime et entêtante mélodie de guitare qui sait rester discrète, (et pour le coup, il est très juste de parler ici de modernité), et le style très particulier de « Long Way From Home », totalement hors des sentiers battus. Sur la chanson titre, « Swimming The Atlantic » (pas la meilleure) ou sur « Bhb », on pense à Skaville UK, et si on se demande pourquoi le groupe a cru bon de nous coller une deuxième version de « Freedom Fights » en fin de disque, on kiffe pas mal « Do I ? », même si j’en entend déjà hurler à horrible variétoche, et la très reggae et assez planante « Spa-da-ba-dap ! » avec sa gratte à la Eddie Van Halen.

On ne peut pas vraiment dire qu’en 2013 j’attendais énormément d’un groupe comme Freetown, mais je dois bien avouer que je suis très agréablement surpris par cet album pas comme les autres, qui prend soin de marcher à côté du passage clouté, qui se cherche un son propre et qui en regardant du côté de quelques illustres anciens réussit à se trouver une vraie personnalité. Un album à écouter et un groupe à redécouvrir.

Vince

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