RANCID – All The Moonstompers – Chase The Ace Records
UN PEU D’HISTOIRE : Voilà voilà, on va pas vous faire l’affront de vous présenter RANCID en long en large et en travers, mais juste vous rappeler que ce groupe, probablement parmi les meilleurs de l’histoire du punk-rock mondial, a débuté au bord de la baie de San Francisco en 1991, autour de Tim Armstrong et Matt Freeman, pionniers du punk-ska US avec les cultissimes Operation Ivy, et de Brett Reed, un skateur d’Oakland (replacé par Branden Steineckert en 2006).
Après un premier album éponyme, le groupe est rejoint en 93 par Lars Frederiksen, qui fit un temps une pige au sein de Uk Subs. Le second album du désormais quatuor, « Let’s Go », sort en 94 sur Epitaph et se fait pas mal remarquer. Mais c’est un an plus tard avec « …And Out Comes The Wolves » que Rancid devient un phénomène, notamment grâce au succès du hit ska « Time Bomb ».
Suivront « Life Won’t Wait » en 98, « Rancid » en 2000, « Indestructible » en 2003, « Let The Dominoes Fall » en 2009, puis « …Honor Is All We Know » en 2014, tous sortis sur Hellcat ou sur Epitaph (la maison-mère). Sans oublier le « B Sides and C Sides » de 2007 qui racle les (très bons) fonds de tiroirs.
Depuis plusieurs années (2006) un Anglais, Daryl Smith, membre de Cock Sparrer et de Argy Bargy, avait comme projet de sortir sur son label Chase The Ace Records, une compilation des titres ska de Rancid. Depuis le temps on pensait que c’était l’Arlésienne et que le disque ne verrait jamais le jour, et puis en 2015 c’est devenu officiel, « All The Moonstompers » allait arriver dans les bacs avant l’été.
LE DISQUE : Rancid a toujours, presque toujours mis des morceaux ska sur ses albums. Et du bon. Il semblait donc criminel que personne ne se décide à les compiler et à les envoyer à la face du monde. Jusqu’à ce que Daryl Smith se lance et publie les 19 titres de « All The Moonstompers », chopés un peu à toutes les époques de l’histoire du combo de Berkeley. Et comme il fallait soigner l’objet, Smith en a confié l’artwork à Alteau et à son magnifique coup de crayon BD pour une pochette magnifique qui à elle seule justifie l’achat du skeud.
Forcément, on ne va pas vous dire que le disque est surprenant, car quand on aime Rancid on connait bien son répertoire, même si certains morceaux ici présents ne figurent pas sur les albums officiels.
Le skeud commence évidemment par l’énormissime « Time Bomb », l’une des plus belles ska-songs jamais pondues, celle qui avait lancé la vague au mitan des 90’s, et envoie certains des hits ska les plus fameux de la fine équipe de crêteux: « Red Hot Moon », chef d’oeuvre, « Up To No Good », magique, « Old Friend », incontournable… On connait mais c’est jouissif, roboratif, de se les écouter en enfilade dans son salon, et de se dire que décidément, l’un des meilleurs groupes de ska américain est un fait un groupe de punk-rock qui a tout compris.
Forcément, sur « All The Moonstompers » on retrouve pas mal de morceaux de « Life Won’t Wait », sur lequel Rancid avait invité une multitude de potes issus de la scène ska, reggae, punk, voyez plutôt la dream team: Dicky Bartett (MMB), Billie Joe Armstrong (Green Day), Neville Staple, Roddy Radiation et Lynval Golding (The Specials), Vic Ruggiero et Dave Hillyard (The Slackers), Alex Desert (Hepcat), Eric Stefani (No Doubt), Buju Banton, Roger Miret (Agnostic Front)… Et ça donne du bon voire de l’excellent avec « Hooligans » au skank implacable, « Life Won’t Wait », la chanson-titre à l’ambiance nocturne et inquiétante, la scansion de « Crane First », l’harmonica de « Cocktails », et « Wrongful Suspicion », coécrite par Vic Ruggiero, un autre génie américain.
Ce que j’apprécie tout particulièrement, ce sont ces B Sides, comme « Stop », parangon de chanson ska-punk incisive et précise, avé la section cuivres ! ainsi que, juste après, « Things To Come », pépite à mi-chemin entre ska et américana récupérée en face B du single de « Hooligans » en 98. C’est du grand, du très grand art.
Et tout cela de se terminer avec style par « That’s Just The Way It Is Now », tirée de « Let The Dominoes Fall », immense titre fortement inspiré par le son des Transplants et par « A Poet’s Life », l’escapade de Tim Armstrong avec les potes de The Aggrolites. Tout Rancid est résumé dans cette chanson: le ska, le punk-rock, la voix de traviole mais toujours harmonieuse, des backing-vocals de toute première bourre, un beat métronomique, une absence totale d’oeillères, des arrangements qui tuent et toujours, une sacrée putain de modernité dans le son.
Rancid est un groupe de génie, un groupe de génies. Et « All The Moonstompers » un incontournable du ska d’aujourd’hui.
Vince