RUDE BOY TRAIN’S CLASSICS – VIKING’S REMEDY-Rain Is Coming – (2002-Patate Records)
« Rude Boy Train’s Classics », c’est une série de chroniques d’albums qui ont marqué l’histoire du ska, du rocksteady ou du skinhead reggae. Standards objectifs reconnus par le monde entier ou chefs d’oeuvre personnels qui hantent nos jardins secrets, la rédac de Rude Boy Train vous fait découvrir ou redécouvrir ces albums majeurs qui méritent d’avoir une place de choix sur vos étagères ! Rendez-vous le premier vendredi de chaque mois…
UN PEU (BEAUCOUP) D’HISTOIRE : Quand en 1998, les Rude Boy System, qui commencent à entrevoir un certain succès, décident de prendre la route aventureuse de l’intermittence, les quelques membres du groupe ayant déjà un taff à plein temps se retrouvent dans l’obligation de quitter le navire.
Mais les débarqués, sous l’impulsion du tromboniste Lord « Magic » sont bien trop mordus pour lâcher l’affaire et relancent ce qui n’était pour l’heure qu’une sorte de side-project rocksteady, regroupant un noyau de RBS de la première heure, nommé Viking’s Remedy. Le style est donc principalement rocksteady, early reggae avec quelques morceaux de ska dedans, sur lesquels on découvre tout le talent vocal de la chanteuse Queen Sonya, issue du gospel.
Déjà présents sur le premier EP du label Magic, monté spécialement pour autogérer le groupe Rude Boy System , avec le titre « Over And Over » , ils se tapent quelques sessions d’enregistrements dont ils distillent au compte-goutte les fruits, au grés des sorties des compilations ska Françaises. On découvrira ainsi le titre éponyme et le délicieux « Mrs Weed » sur la sortie maison « Ska Trad Volume 1 » et le non moins délicieux « Rocksteady Memories » sur « Skappellation D’Origine Controlée » concoctée par Skanews et sortit par Moon Ska Europe. Le groupe tourne un peu avec un passage remarqué au Dance Ska La de 1999… Mais on reste sur notre faim pendant près de deux ans avant l’apparition en 2001 d’une nouvelle pépite « I Spend My Time » sur « It’s A Frenchy Reggae Vol.3 » qui nous laisse une fois de plus la bave au coin des lèvres.
Ce n’est qu’en 2002 que sort le tant attendu « Rain Is Coming », chez Patate Records. On y retrouve l’ensemble des titres disséminés ici ou là dans des versions qui semblent réenregistrées et le skeud dépasse souvent les pourtant grandes espérances que le groupe avait suscitées.
On n’attendra que deux ans la suite de cet excellent premier opus… « Welcome » arrive dès 2004 sur Big 8 Records avec une recette très proche, avec ses sons plutôt Early Reggae, des passage au chant du Lord himself sur des skin-reggae puissants, et une fin d’album assurée par le pendant dub du groupe nommé Echo Chamber. Une fois de plus un disque de chevet pour tous les rude boys de France et de Navarre…
Le retrait de Queen Sonya et de quelques autres zicos mettra fin à l’aventure Viking’s Remedy, mais pas a celles de « Magic Lord » qui sortira en 2005, dans une formation très proche avec une nouvelle chanteuse, nommée cette fois ci The Mighty Drakkars un « New Day » dans la même veine, tant au niveau style que de la qualité, mais aussi des sons 100% skin reggae sur son nouveau label Drakkar Records avec ses Bovver Boys… Les dernières traces laissées étant celle du groupe Wacetonians, qui joue un Skinhead reggae avec de la cornemuse, le tout en patois Normand, une curiosité !
Hasards du calendrier, alors que j’écris ces lignes, il semble bien que les Mighty Drakkars aient remis le bleu de chauffe avec quelques nouveaux titres déjà sortis en version 45t ultra limitée annonçants la sortie prochaine d’un nouvel album.
LE DISQUE : Je me souviens avec quelle fébrilité et non moins d’impatience j’attendais ce premier album, absolument sous le charme que j’étais des premiers titres de ce groupe qui tentait de se rapprocher au plus près des sons 60’s magnifiés par les harmonies vocales fabuleuses de Queen Sonya et ses choristes. Et l’attente ne fut pas veine. Après cette intro vintage qui confirme le goût du groupe pour le chic et l’élégant, « I Spend My Time » fait dans le rocksteady classieux à la Derrick Harriot avec un orgue voluptueux, des cuivres feutrés et un final soul qui laisse le temps en suspend. « Over And Over », malgré son intro annonçant un « rocksteady stylee » donne lui plutôt dans l’early reggae bien nerveux avec une perf de haut niveau de la section chant, entre des couplets saccadés quasi-hip-hop, et son bouquet final tout en choeurs…
Ne se revendiquant jamais vraiment du style ska, les Vikings nous offrent pourtant plusieurs excellents titres s’en rapprochant fortement. C’est le cas de ce « Walking Garage » avec ses chouettes solos de sax et de gratte, de l’explosif « Go Down Moses » reprise d’un titre gospel ténébreux popularisé par Louis Armstrong, avec son malicieux clin d’œil au Sally Brown de Laurel Aitken, ou « Mrs Weed » aux mirifiques harmonies vocales. Trois titres qui rendraient jaloux bien des formations actuelles…
Mais le cœur de métier des Viking’s Remedy reste bel et bien le rocksteady et l’early, comme le prouvent « Across The Land », et la puissance de ses voix carrément gospel soulignées d’une belle ligne de guitare et d’une rythmique tendue a coup de cuivres, ou la reprise du classique de Barbara Lynn « You’ll Lose A Good Thing » rebaptisée ici « If You Should » à l’Hammond chaloupé et aux arrangements riches et inspirés.
Sur « Blackula » en mode « terror » skinhead reggae chanté par Lord Magic himself, le groupe assure une prestation fiévreuse. L’instru « Jackie, Ansell & Winston » est un hommage réussi à trois producteurs incontournables alors que sur le morceau titre « Rain Is Coming », ils nous pondent une merveille de reggae 70’s brumeux, transpercé d’un solo de sax tranchant comme un rasoir.
L’album se conclut sur un « Rocksteady Memories » plaisant et dansant, un des hits incontournables du skeud. Clavier, rythmique, cuivres et voix, tout semble parfaitement à sa place.
Sans faire offense aux acteurs de l’époque, ou pourrait éventuellement regretter une prod un poil légère, le genre de bandes qu’on rêverait voir passer à la moulinette d’un Brian Dixon par exemple. Mais si on remet tout ça dans son contexte d’époque , ce disque ne fait que transpirer un amour immodéré pour la musique Jamaïcaine des sixties, un esprit «Do It Yourself » perfectionniste et un goût prononcé pour les petits détails qui tuent, jusqu’a son artwork, simple mais efficace et cohérent.
Presque 15 ans plus tard ce « Rain Is Coming » reste un vrai régal de bout en bout, jusqu’à son dub caché en mode fantôme sur la dernière piste.
A French Classic, isn’t it ?
Bronsky
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