RUDE BOY TRAIN’S CLASSICS – DR WOGGLE & THE RADIO – Suitable (2001-Elmo Records)
« Rude Boy Train’s Classics », c’est une série de chroniques d’albums qui ont marqué l’histoire du ska, du rocksteady ou du skinhead reggae. Standards objectifs reconnus par le monde entier ou chefs d’oeuvre personnels qui hantent nos jardins secrets, la rédac de Rude Boy Train vous fait découvrir ou redécouvrir ces albums majeurs qui méritent d’avoir une place de choix sur vos étagères ! Rendez-vous le premier vendredi de chaque mois…
UN PEU (BEAUCOUP) D’HISTOIRE : Faut croire que ça faisait classe de se la jouer docteur en Allemagne dans les 90’s !
En tous cas, c’est sous le drôle de sobriquet de Dr Woggle & The Radio que se pointent les sept zicos de Weinheim, pas loin de la frontière Alsacienne, juste avant le grand boom de l’année 2000. Leur style, plutôt orienté vers les 60’s est pourtant fortement marqué de l’empreinte du ska revival « à l’allemande » de leurs illustres aînés comme The Busters. Mais le talent est bien présent et le mix prend si bien qu’ils sont lancé par Elmo Records, le side label de Grover pour un premier album en 2001, « Suitable », en parfait équilibre entre les deux inspirations sus-nommées…L’album reçoit un bon accueil qui leur permet de tourner un peu partout en Europe, avec quelques dates mémorables en France.
Fort de ce succès, « Bigger Is Tough » sort rapidos derrière, dès 2002, chez la maison mère, Grover Records… Comme le lion affiché sur la pochette pouvait l’indiquer, les Dr Woggle prennent des inflexions plus reggae, avec toujours des belles qualités, mais ce tournant aura moins de succès auprès des rude boys d’Europe et de Navarre. Ce ne sera que cinq ans plus tard qu’on retrouvera Nikolaus le chanteur et sa bande pour la sortie de « Rockers », leur troisième opus. Si on y retrouve une bonne dose d’inspiration sixties, avec quelques rocksteady de belle facture, il faut attendre le titre « fantôme », en toute fin d’album pour découvrir un ska instrumental puissant, nous laissant espérer que les troupes du Docteur n’ont pas complètement mis de côté notre musique de prédilection.
La setlist du live sobrement intitulé « Weinheim City Live » enregistré lors d’un des désormais trop rares concerts du groupe et sorti en 2012 semblerait le confirmer avec des reprises impeccables de « Old Rockin’ Chair », « Man In The Street » ou bien du plus récent « No Worries » d’Hepcat. On serre donc les fesses pour le prochain album, puisqu’un retour discographique est annoncé depuis plusieurs semaines sur les réseaux sociaux …
LE DISQUE : Après sa petite intro radio, de bon ton à la vue de leur patronyme, Dr Woggle démarrent ce « Suitable » pied au plancher avec l’instru « Radio Tune », alliance impeccable d’un piano sixties qui claque, de cuivres puissants et d’une rythmique musclée, très revival. Derrière, on nous offre une première sucrerie parfaitement enlevée avec le rocksteady « Revolution » où les cuivres se font plus caressants, le piano papillonne avec l’orgue Hammond et on découvre des voix top classes, dont celle du lead Nikolaus, rauque et puissante.
Retour au fun, évident leitmotiv du groupe, avec un « She’s Hot » sautillant, un titre multi-facettes, aux changements de rythme refrain-couplets parfaitement gérés, finalement très proche d’une compo des grands frères des Busters… Derrière, toujours la banane avec un « Light Up Your Spliff » on ne peut plus explicite, en mode rub-a-dub à l’ancienne avec sa grosse basse et ses parties ragga plutôt digestes en note finale. Puis, pour conclure la triplette, un furieux « Never Ride A Camel » aux frontières d’un third wave plus américain, puissant.
Mais on ne fait pas que se marrer dans cette maison, on sait aussi y faire en matière de rocksteady, comme sur « When I See Your Eyes » au langoureux refrain, sa petite guitare jazzy et ses cuivres feutrés, le somptueux « Too Late » aux arrangements tout en finesse, ou encore avec le délicieux « Put On Your Shoes » et son refrain imparable.
Et puis y’a forcement une bonne grosse dose de two-tone légers, certifiés «Deutsche Qualitat » , comme le « Ten-Nine-Eight-Seven-Six » où l’on reparle de l’herbe qui fait rigoler, ce Mount Zion », qui, hors du sujet de base de son texte, fait dans le très traditionnel revival national avec sa rythmique soutenue aux cuivres et son refrain enjoué.
Une petite dose d’un «funky reggae » de première bourre avec « You Don’t Know Me », ses petites montées soul nickels sur les refrains et son Hammond prédominant, et l’album se termine sur un reggae parfait, « Fire Your Guns » avec ses arrangements cuivres-voix de tout premier ordre…
Avec ce « Suitable », situé à la croisée de multiples chemins, du trad au revival, du reggae au ska le plus puissant, Dr Woggle & The Radio déboulait, sans prévenir, en bonne place dans la liste des groupes qui comptent en Europe… Un skeud qui, par les qualités des compos et sa prod au dessus de la moyenne, méritait bien de figurer au rang des classics de Rude Boy Train.
Bronsky