RUDE BOY TRAIN’S CLASSICS – TOO HOT- Wise Up ! (2002-Burn Your Fingers Records)
« Rude Boy Train’s Classics », c’est une série de chroniques d’albums qui ont marqué l’histoire du ska, du rocksteady ou du skinhead reggae. Standards objectifs reconnus par le monde entier ou chefs d’oeuvre personnels qui hantent nos jardins secrets, la rédac de Rude Boy Train vous fait découvrir ou redécouvrir ces albums majeurs qui méritent d’avoir une place de choix sur vos étagères ! Rendez-vous le premier vendredi de chaque mois…
UN PEU(BEAUCOUP) D’HISTOIRE : Quand déboule Too Hot pour quelques dates en France a l’occaz’ d’une tournée Européenne en 2002, on n’est pas bien nombreux à savoir ce qui nous attend sur scène. D’ailleurs, même ceux qui les connaissent n’ont souvent que croisé quelques bons titres comme « In Search Of Harry » sur le deuxième volume de l’excellente « United Colors Of Ska » de Pork Pie en 2000.
Pourtant, la bande de Devon, dans le sud de l’Angleterre, existe depuis le début des années 90 et a déjà plusieurs singles à son actif, et même un premier album nommé « Nice’N’Easy »… Les gênes sont bien sûr 100% British et c’est sans surprise du two-tone pur jus, aux teintes parfois plus pop grâce à la voix très particulière de leur chanteur Glyn Wilcox. Le groupe vient donc présenter alors son deuxième album, « Wise Up » à la superbe pochette, avec en guest sur deux morceaux, s’il vous plait, Mister Roddy Radiation, et Roger Lomas, l’incontournable producteur de la grande époque two tone aux manettes.
Bien que la carrière du groupe peine à franchir la Manche, le groupe ressortira tout de même, malheureusement de manière trop confidentielle un troisième album en 2006, nommé « Time Flies » où apparaissent quelques influences rocksteady et reggae. Ils se produisent assez régulièrement jusqu’en 2009, année où le groupe semble splitter. Ils réapparaissent pourtant encore occasionnellement jusqu’en 2012. Il faut dire que depuis, le bassiste Del Anning, le batteur Rob Murphy, le Sax Keith Waller et le chanteur Glyn Wilcox ont intégré les excellents Simmertones, aux orientations beaucoup plus 60’s, un des groupes les plus cool du moment chez nos cousins Grands Bretons.
LE DISQUE : Les membres de Too Hot étaient Anglais et forcément biberonnés au two-tone… Dès « Too Hot In The City », on s’en déguste une bonne tranche dans la plus pure tradition locale, entre son drop de basse bien rond, et son texte à base de soirées entre potes la bière à la main, bien sûr. Pourtant la qualité de la section cuivre nous rapprocherait plutôt des meilleures formations d’Outre-Rhin…
D’ailleurs, sur le « Feelin’ Happy » qui suit, avec son gimmick puissant et omniprésent, c’est clairement aux caïds de l’époque, les Busters, que l’on pense, même si la ligne de basse et le phrasé saccadé de Glyn Wilcox rappellera à bien des égards Terry Hall et ses Specials.
Le chanteur, avec sa voix plutôt originale pour le genre, est donc un autre des très grands atouts de la bande de Devon. Sur « In The Sunshine » ska bien pop avec son piano très « Maddies », on croirait presque, sur les couplets, entendre Morissey chanter du ska. Le titre est une belle sucrerie douce amère avec son alternance couplet en demi-teinte et refrain lumineux gorgé de soul.
Bon, forcément, le cœur de métier des britishs reste le two-tone, sous toutes ses coutures, sautillant à la Bad Manners sur ce « Victoria Way » délicieux, sur un « Bad Day », aux cuivres enjoués et efficaces, ou sur l’excellent « Without You », ce qui n’est finalement pas trop étonnant quand on se rappelle que l’homme aux manettes a aussi produit la quasi-totalité des titres du bon Buster Bloodvessel…
Il y a aussi une grosse poignée de titres assez furieux comme l’instru « Special Agent », speed mais maitrisé, blindé de solos, sur lequel Roddy Radiation vient poser sa guitare au son toujours si singulier… Il revient d’ailleurs sur un titre quasi-punk « The Two Of Us », du genre à la cool avec son refrain bien cuivré.
Et puis il y a les deux petits bijoux que sont l’instru « Wise Up ! » qui donne son titre au skeud, à l’air pas forcément original mais à la classe indéniable, arrangé puissamment façon big-band, et puis ce « Accross The Sea » où les Anglais viennent friser la moustache du TSPO, joué avec une maestria digne des Nippons, affichant une puissance de feu rarement vu de ce coté ci du Channel…
L’album se conclut en beauté avec le retour d’un petit piano à la Barson sur ce dernier titre encore très pop « Can’t Wait », pépite empreinte d’une belle mélancolie, du genre qui vous ramène à la notre, celle d’une époque où l’on pouvait tomber, presque par coup de bol, sur un set d’un groupe de ce gabarit.
Ces Too Hot avaient définitivement une sacrée classe, et, avec ce « Wise Up ! » varié, ils se glissaient tranquillement dans le peloton de tête des groupes de l’époque… Largement de quoi mériter sa « classics » chez Rude Boy Train.
Bronsky