Rude Boy Train

TWO TONE CLUB – Don’t Look Back – Productions Impossible Records

UN PEU D’HISTOIRE: le TWO TONE CLUB débute sa carrière en 1999 à Montbéliard sur les cendres des ex-Gangsters All Stars, prenant le parti pris original d’affubler à chacun de ses musiciens un surnom lié à une couleur, en référence à Reservoir Dogs.

Ses influences couvrent  toutes les périodes du ska : 60’s, two tone, revival, avec des gros morceaux d’early reggae et de rocksteady dedans. Le groupe profite allègrement de sa situation géographique pour jouer un peu partout en Europe

Après son premier EP, « We’re Going… » sortit sur Like A Short Records en 2001, ils publient leur premier album, «One», dès 2002, chez Productions Impossible Records. Dans la foulée, le groupe participe au Dance Ska La à Rennes et figure avec trois titres sur la compilation live du festival.

En 2004, Two Tone Club participe aux Eurockéennes de Belfort. Le deuxième album, « Turn Off », mixé par Victor Rice (Stubborn Allstars, Firebug, ex- Slackers…), sort sur le même label en 2005 et est réédité ensuite par Big 8 Records et Grover Records. Two Tone Club participe à de nombreux festivals, notamment le cultissime Postdammer Ska Fest en Allemagne et au Dutch Ska Fest aux Pays-Bas. Il obtient alors autant de succès par chez nous qu’au delà de nos frontières.

« Now is the time », leur troisième album, est enregistré au Studio des Forces Motrices à Genève et parait en 2007 aux Productions de l’Impossible et chez Grover Records. Produit par Brian Dixon, il bénéficie à fond de la patte de l’ex-Aggrolites qui polie avec talent des perles de compos comme on en avait rarement entendu chez nous.

Après une salve de concerts costauds de chez costauds, le groupe semble se mettre en sommeil, pâtissant de la dispersion de plusieurs membres dans d’autres aventures, musicales ou personnelles. Le groupe continue pourtant de jouer de manière sporadique, bouchant les trous avec quelques-uns des meilleurs zicos de la région, comme ceux du 65 Mines Street avec lequel ils partagent alors Mr Purple, l’incontournable et talentueux clavier.

Paradoxalement, c’est le départ définitif de ce dernier qui semble relancer le groupe. Il faut quasi tout reconstruire et c’est avec l’apport d’un membre du NSJO à la guitare, un ex-Bobby Sixkiller à la basse et un nouveau clavier qu’ils reviennent sur scène en 2016 pour quelques concerts…

La formation se stabilise, renoue plus régulièrement avec la scène et reprend le chemin des studios… Il nous faudra alors encore patienter deux longues années et ce 10 Mars 2018 pour déguster le nouveau cru Two Tone Club, nommé « Don’t Look Back », produit par Tony Platt, connu pour ses collaborations aussi diverses, comme Bob Marley ou Aswad,  que variées comme AC/DC, Motorhead, Gary Moore ou Buddy Guy, et toujours édité par les Productions Impossible Records.

LE DISQUE: Dire que ce nouveau Two Tone Club s’est laissé désirer serait un euphémisme, sorti plus de dix ans après l’excellent « Now Is The Time ». Mais notre patience ne fût pas vaine parce que « Don’t Look Back » est tout simplement un petit bijou.

Singularité éditoriale sympathique, la version vinyle débute par le tout dernier titre de la version cd. Lorsque que l’on tombe sur « My Friend » à mi-chemin entre reggae et pop, qui synthétise avec brio la plupart des influences British du Club, avec ses cordes léchées bien épaulés par des cuivres puissants et des claviers inspirés, on est radicalement pris aux tripes par ce titre éminemment somptueux, et on se dit que ça part fort.

Pendant ce temps-là, les possesseurs du cd se diront la même chose en se mangeant pleine tronche l’explosif two-tone « So What » qui transpire le « Specials » de tous ses pores, surpassant même en puissance les illustres ainés de Coventry, avec cette guitare tranchante comme un rasoir, son texte et ses refrains balancés comme des pavés dans une vitrine un jour d’émeute.

Qu’importe la version, derrière, ça enchaîne dans le genre classique du crew de Montbéliard, avec ce « Time’s Up », ses cuivres reconnaissables entre milles, cette rythmique hypnotique, ce groove sans faille du duo guitare/claviers et ce texte scandé comme seul Linton à ma connaissance sait le faire. Bonus à la Doubienne, un grand numéro final de trompette absolument excellent.

Au rayon des titres labellisés 100% TTC, « Epitaphe », reggae cool au texte en Français aux arrangements vocaux travaillés, Le dégingandé  early « The Man Who Says Yes » ou encore  l’instru posé et magistral « Exodus 14-21 », dans la lignée du « Volstead Act » ou du plus ancien « Frankenstein » se posent là avec ce style aussi indéfinissable qu’identifiable dès les premières notes.

Et puisqu’on est du côté des instrus, on ne boudera pas notre plaisir à vous parler des deux boss-reggae que sont « Black Mamba » et « Wounded Knee ». Si le premier n’a pas l’impact d’un « Nuh Tell Me What To Do » période Mr Purple, il envoie quand même du lourd  avec ses riffs de guitare acérés surfant sur des nappes d’orgues bien puissantes. Le second la joue en finesse, plus Carolo qu’Aggro si vous voyez ce que je veux dire. Sa belle rythmique légère et funky est survolée majestueusement par plusieurs claviers papillonnant avec bonheur.

Lorsque que les cuivres s’en mêlent sur le ska « Three Little World », on atteint carrément des sommets, avec un chorus lumineux, des breaks diaboliques et des solos d’enfer dignes d’un TSPO des grands jours.

Le Club s’essaye aussi à la northern soul avec un certain bonheur sur « I’m Not Safe With Your Love » (qui figure lui sur un 7’ bonus dans la version vinyle) bien péchu, d’un niveau pas si courant dans nos contrées, se la joue reggae « Clashien » sur une « Heaven Time » au final discoïde plutôt réussi  et régale avec son rocksteady titre « Never Give Up », où la voix de Linton se pare de velours et dont les chœurs lumineux ne dépareilleraient pas sur une production west-coast récente.

Et puis il y a les deux « big hits » instantanés que sont  « One In A Million » et ce « Seven Days A Week » qui nous avait tant ouvert l’appétit depuis plus d’un an. Et quand le Club démarre la machine à skanker, ça fait mal, très mal: avec sa ligne de basse on ne peut plus familière et ce rythme juste soutenu comme il faut par des cuivres discrets, la trame est parfaite pour le texte écrit en français en l’honneur de Mme Black, relevé comme il faut par le toast posé de l’excellent Horseman.

Le second nommé, lui, se déguste comme un vieux truc du genre élevé en fût de chêne, avec un duo piano/Hammond des grands soirs, des cuivres énormissimes qui virevoltent sur un skank du tonnerre et un refrain du même tonneau, on le croirait sorti tout droit d’un best of de Trojan.

Avec ces 14 titres d’un niveau incontestablement international, couvrant avec réussite une variété de styles formidable, Two Tone Club revient en grande pompe sur le devant de la scène. « Don’t Look Back » laisse entrevoir un retour live des plus explosifs, en espérant que les programmateurs de salles réouvriront leurs portes au ska à l’écoute d’un tel skeud.

Bronsky

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