BOOBOO’ZZZ ALL STARS – Studio Reggae Bash – Baco Records
UN PEU D’HISTOIRE : BOOBOO’ZZZ ALL STARS, ça fait maintenant trois ans que ça existe, et c’est un collectif reggae/soul de Bordeaux dans lequel on retrouve des membres des Rockin’ Preachers, de Train’s Tone ou des Jouby’s .
Pendent plusieurs mois, le groupe assure les soirées « Reggae Bash »au Booboo’zzz, un rade de Seignosse, en invitant des tas de chanteurs à les accompagner, et à force de rencontres, ils enregistrent des vidéos nickelles propres qu’ils diffusent sur YouTube.
C’est sur la base de ces sessions que Booboo’zzz All Stars décide de publier un premier album en mars 2017, composé de 13 reprises avec à chaque fois un(e)chanteur(euse) différent(e), de Max Livio à Guive, de Peter Harper à Laurène.
LE DISQUE : A la lecture de la tracklist, on est obligé de poser une question fondamentale : mais où est donc passée la reprise de Daho (« Le Premier Jour du Reste de Ta Vie ») chantée par Merlot ? Parce que si vous avez vu la vidéo, vous devez trouver comme moi que ce titre-là est certainement l’un des meilleurs de ces « Reggae Bash ». Sauf qu’il est pas là. Pourquoi ? Mystère (une affaire de droits ?).
Mais sur les treize morceaux ici présents, rassurez vous, il y a de quoi faire. Ca démarre avec « I Need A Forest », pas le top du skeud à mon goût, un peu trop planant pour bibi, un peu dubesque sur les bords, mais reconnaissons que c’est propre, bien produit, professionnel à l’instar du reste de la galette (mais à mon avis ça n’a pas sa place en début d’album).
Juste après on retrouve l’un des morceaux-phare du disque, « La Nuit Je Mens », empruntée comme vous le savez au grand Bashung. L’originale est un monument de la chanson française qui dans 30 sera reconnue au niveau du meilleur de Brel ou de Brassens, et si les Booboo’zzz auraient pu se prendre les pieds dans le tapis, ils évitent avec brio les chausse-trapppes. Au début, on est surpris d’entendre Max Livio prendre le chant si haut, on croit même qu’il est faux et qu’en ne respectant pas les notes il va saccager la statue du Commandeur, mais en fait non, en chantant à sa manière il évite de se confronter au boss et livre une interprétation personnelle de bien belle facture.
Il y a aussi sur cet album de bien beaux morceaux chantés par des voix féminines. Naé réussit une merveilleuse « The Worst » (de Jhené Aiko, jamais entendu parler) reggae-pop, et juste après, Laurène reprend Björk (« Venus as A Boy ») comme aurait pu le faire Hollie Cook. C’est calme, c’est ouaté, langoureux, parfaitement chanté (c’est le moins qu’on puisse dire) et le groupe derrière joue sa partition de façon millimétrée, mais avec une âme derrière.
Les Jouby’s font très bien le job sur « Easy » des Commodores dans un registre assez roots, et en enfilade, Guive reprend « It’s Not Unusual » de Tom Jones avez style.
Et quand Flox interprète « Habits » (de Tove Lo, jamais entendu parler non plus) en mode early-reggae, on se dit « qu’est-ce que c’est que cet Anglais qui chante aussi bien et dont j’ignorait l’existence ? » Là on tiens un pur hit de reggae chaloupé comme du Aggrotones d’une rare finesse, et même que c’est pas fini…
Parce que derrière se pointe Noraa qui envoie « You Know You Like It » d’Aluna George (connaît toujours pas) dans un registre beaucoup plus moderne, avec des arrangements d’une classe absolue, avec un flow imparable pour un petit chef d’oeuvre de reggae bien de chez nous.
Je voudrais m’arrêter-là, mais faut bien vous conseiller d’aller écouter Dre Gipson échappé de Fishbone chanter « Love Is A Loosing Game » d’Amy Winehouse, somptueuse, et tant qu’on est dans les pointures américaines, on notera la présence de Peter Harper (frère de l’autre) qui pour le coup reprend le tube planétaire de Buffalo Springfield « For What It’s Worth », assez bien envoyé. Sauf que je préfère clairement le phrasé hip-hop de Volodia qui trouve parfaitement sa place sur la version reggae de « RMI » de MC Solaar, ou Jon Jon avec une bien belle « Né Quelque Part » du sous-estimé Maxime Le Forestier.
Et puis bien sûr il y a le standard de Gorillaz, « Clint Eastwood », chanté par Oliver Smith (en fait c’est le clavier des Rockin’ Preachers et des Booboo’zzz) qui te met un flow là-dedans mazette, que tu sais pas comment tu peux l’arrêter tellement c’est implacable, propre et net, rasé sous les aisselles et lavé au Tahiti Douche. Et ce final de toute beauté ma parole…
Voilà un groupe de reggae qui a compris que quitte à reprendre les chansons des autres, mieux valait éviter Marley ou les Skatalites et s’attaquer à un répertoire qu’on n’attend pas forcément dans ce genre d’ambiances.
Rien à jeter ici, la réussite est totale. Les Booboo’zzz All Stars viennent de livrer un grand album de reggae français. Un grand album de reggae tout court.
Vince