KING PEPE & HIS CALYPSO COMBO, L’INTERVIEW !
Interview de Fabrice, alias King Pépe, et de Tony, percussionniste/choriste du Combo dont le premier album, « Tropical Invasion », vient juste d’atterrir dans les bacs (s’il en reste) des bon disquaires (il en reste). On y parle de mento et de calypso (forcément), de Jump Up Records, de Trinidad et Tobago, de la Jamaïque, des Bermudes et des Bahamas… Hummmm, ça sent bon les vacances…
RUDE BOY TRAIN : Salut KING PEPE & HIS CALYPSO COMBO, et merci de répondre aux questions de Rude Boy Train !
Tony : Salut Rude Boy Train, content d’être là !
Fab : Hello !
RBT : Donc ça y est, le disque est sorti depuis une semaine, comment il est accueilli pour l’instant, ça se passe bien ?
Tony : Plus que bien, l’album est dans les bacs depuis Le 10 juin, on est content de pouvoir toucher notre disque après cette belle aventure d’enregistrement et de création…
Fab : On a de bons retours, tout d’abord des gens proches de nous, des amis musiciens, de la presse…
RBT : Faut dire que vous êtes sur un créneau où il n’y a pas grand monde…
Fab : Ben écoute, il y en a de plus en plus tout de même…
RBT : Disons que pour le grand public, et même le public un peu spécialisé, on ne voit pas défiler grand chose en calypso/mento…
Fab : C’est pour ça il faut que de plus en plus de gens connaissent ces genres musicaux. Nous on voulait vraiment sortir un bel album pour représenter le calypso français…
Tony : En tout cas les vielles musiques reviennent, le vieux son avec ce grain chaleureux pointe son nez sur les ondes des radios, c’est plutôt bien…
Fab : Il en va de la survie des cultures qui prennent le large…
Tony : Et cet album nommé « Tropical invasion » peut être entendu comme un récit de voyage…
RBT : Justement, comment vous êtes allés vers ces styles musicaux au départ ?
Fab : Pour moi c’est en partant du reggae… J’ai divergé vers le rocksteady et le ska, et je suis alors tombé amoureux du vieux son caribéen… Je suis allé naturellement vers le mento puis le calypso, et j’écoute que du vieux son. Je suis aussi un grand fan de jazz des années 30/50, mais je n’ai jamais été dans les Caraïbes. Tony par contre est un grand voyageur…
Tony : De mon côté je suis parti des musiques africaines et cubaines en passant aussi par le reggae en tant que guitariste. J’ai découvert les Caraïbes en voyageant plus vers Cuba.
Fab : Et David le contrebassiste lui a été au Mexique…
RBT : La Jamaïque, les Bahamas, Trinidad, c’est des endroits que tu connais ?
Tony : Je connais surtout Cuba. Le calypso je le joue depuis la rencontre avec Fabrice il y bientôt trois ans.
Fab : Tony a ramené la folie du rythme dans le groupe…
RBT : C’est avec quels artistes que tu as découvert le mento et le calypso Fabrice ?
Fab : Alors, Harold Richardson, Count Lasher, Lord Kitchener, King Sparrow, Blind Blake et j’en passe… J’ai bien senti qu’il y avait un bon groove chez ces artistes des années 50… Parce que dans le calypso/mento ce sont les années 50 qui m’ont marqué tout d’abord…
RBT : Et t’as trouvé ça en vinyle ?
Fab : Oui j’en acheté plein sur ebay et j’ai pas pris le temps de faire les vides greniers… Et c’est là que j’ai lancé Frémeaux sur des compiles calypso/mento…
RBT : C’est des disques qu’on trouve facilement ? Y avait eu des gros tirages à l’époque ?
Fab : Je ne sais pas. Les tirages MRS jamaïcains sont assez rares mais d’autres qui ont été pressés et produits aux States ont dû être tirés à pas mal d’exemplaires. Mais il y a trois ou quatre ans il y en avait beaucoup sur ebay, pleins d’affaires…
RBT : Sur quels labels on trouve du vieux calypso ?
Fab : Le label Art Records pour les Bahamas, Kalypso & MRS pour le Mento, Cook pour Trinidad, Bermuda pour les Bermudes par exemple car il y a eu du calypso jusque dans les Bermudes !
RBT : Un peu partout dans les caraibes même non ?
Fab : Oui, au Costa Rica aussi…
RBT : Ça n’a jamais pris en Guadeloupe ou en Martinique ?
Fab : Ben non car c’est pas la même culture…
Tony : La base est là tout de même, via les musiques campagnardes…
Fab : Les p’tites Antilles sont francophones, mais ça a sûrement influencé tout de même…
Tony : Et le gwoka en Martinique, séga et compagnie…
Fab : On peut le voir dans la musique d’André Salvador et Henri Salvador (ils sont frères). Ils ont fait du calypso, et ils viennent des Antilles…
RBT : Et justement, est-ce que vous pouvez nous expliquer la différence entre calypso et mento ?
Tony : L’influence du calypso s’est propagée comme pas mal de styles. Les Caraïbes c’est le berceau d’un millier d’ethnies africaines réunies… Les instruments à l’intérieur des Caraïbes ont aussi voyagé avec parfois quelques transformations…
Fab : Le mento rural est bien différent du calypso de Trinidad. Avec des formations plus simples… La rumba box, les maracas bien avant, le banjo, le bamboo sax…
Tony : Oui ça c’est clair…
Fab : Et dans le mento y’a jamais de formation à plusieurs vents… Des sections quoi…
Tony : Il y a toujours une base rythmique en commun avec la clave, bien typique des Caraïbes…
Fab : Et c’est bien différent même dans les textes. Les calypsoniens étaient plus engagés dans leur musique… Le calypsoniens de Trinidad je veux dire…
RBT : Est-ce qu’on peut circonscrire la naissance du mento à la Jamaïque, et celle du calypso à Trinidad ? Ou est-ce que c’est plus compliqué ?
Fab : Ces deux musiques ont vu le jour bien avant l’époque à laquelle elles ont été enregistrées… Bien avant le vingtième siècle. Elles étaient encore plus « primitives »…
Tony : Le meilleur vecteur pour voir d’où vient une musique c’est souvent en prenant comme base l’origine des esclaves…
Fab : Oui, ces musique sont nées dans les campagnes, et il faut savoir que le mento Jamaïcain a été enregistré très tard à partir de 1951… Le calypso c’est plus tôt, dès 1914… Le calypso serait peut-être la première world music enregistrée…
RBT : En 78 tours ? Ou même un format plus ancien encore ?
Fab : En 78 tours ouais…
RBT : Et comment vous vous êtes retrouvé sur Jump Up Records ? Vous connaissiez Chuck ?
Fab : Non c’est grâce au 45 tours sorti chez Jewels. Il nous a envoyé un mail pour nous dire qu’il voulait sortir un 10’ avec nous… Il a eu ce 45 tours entre les mains et voilà…
RBT : Cool ça ! D’ailleurs le 10’ de chez Jump Up comporte deux titres en moins je crois …
Fab : Oui car c’est un 25 cm et plus tu mets de titres sur un vinyle, et moins y’a de patate. C’est donc trop… Et même dix titres sur un 10’ c’est trop… On a donc été voir Romain Dallaine pour avoir un bon son bien vintage…
RBT : Jim Murple Memorial c’est un groupe que vous écoutez à la base ?
Fab : Oui carrément !
Tony : Pareil !
Fab : Moi j’étais fan et je le suis toujours. C’était trop bon de rencontrer Romain… Que de rêves qui se sont réalisés !
RBT : Il a du matos spécial dans son studio pour enregistrer à l’ancienne ?
Tony : Oui, nous on a voulu se rapprocher d’un son à lampe, d’un son à bandes pour l’album. Et Romain nous a bien boostés, c’est un chouette musicien, généreux…
Fab : Ouais belle rencontre…
RBT : C’est quoi un son à lampe ?
Fab : Un son à lampe c’est un son qui passe dans des machines préamp qui marchent avec des lampes. Ça donne une couleur…
Tony : Oui il est équipé de vieux amplificateurs équipés de lampes, le son est plus chaux que le numérique, vraiment plus chaud…
Fab : Et les couleurs chaudes en fait, ce sont les saturations…
RBT : C’est avec ce type de matériel qu’il enregistre aussi pour Jim Murple Memorial ?
Tony : Exactement… Et c’est super important ces petites bandes d’époque…
Fab : C’est un support physique qui vit lorsqu’il enregistre, d’où les saturations qui magnifient le son et lui donnent ce caractère singulier.
RBT : Du coup j’imagine que si vous aimez Jim Murple, vous avez dû apprécier le disque de Mampy…
Tony : C’est du reggae? Ça me dit quelque chose…
Fab : J’ai vu que tu en avais parlé dans l’article du 1er février… J’ai été écouté, c’est bien sympa en effet, mais j’ai pas écouté assez attentivement pour t’en dire plus.
Tony : Ah oui, c’est entre Ernest Ranglin et les Skatalites…
RBT : Yes, un bon mélange jazz, ska et reggae, largement inspiré par Monty Alexander et Ernest Ranglin ouais…
Tony : Et ça swingue bien !
RBT : A mort ! Le guitariste a monté Uncle Joe en parallèle. Vous connaissez ?
Fab : Ouais ! J’ai été voir ce que c’était et ça envoie bien en duo comme ça…
RBT : Et les Mento Men ?
Fab : Oui je vois ce que c’est, mais comme groupe de calypso qui déchire, y a Soul Parasol, ils sont de Caen.
RBT : Ah ouais, je connais pas…
Fab : Y a un des sax qui joue sur notre album. Ça groove, ils sont excellents !
RBT : Ils ont sorti quelque chose ?
Fab : En fait, une partie de ce groupe avait monté les Bakelite All Stars… Sur leur MySpace ils ont des super morceaux…
Tony : C’est vrai qu’ils sont biens ces mecs-là, sympas et en plus ils jouent bien…
RBT : Ok je vois… Ça existe encore MySpace ? Lol. Sinon vous suivez un peu la scène française ska/rocksteady/reggae ?
Fab : Pour ma part de moins en moins…
Tony : De mon côté pas trop non plus. Comme j’étais plongé dans les projets, la création et tout, c’était un peu dur parfois de voir ce qui se passait sur le plan national…
RBT : Et qu’est ce qui tourne sur votre platine en ce moment ?
Fab : Ha, très bonne question !
Tony : Il y les incontournables Groundation, mais évidemment c’est pas du reggae français. C’est l’une des relèves du reggae pour moi…
Fab : Moi j’écoute les derniers volumes (5 & 6) de « London is the place for me » chez Honest Jon’s Records. Sublime !
RBT : Toi qui parles de Groundation Tony, tu connais The Lions ?
Tony : Ouais carrément ! The Lions c’est dans la même veine, mais Groundation quand même ! Et il y un petit jeune appelé Naâman, un Normand qui se débrouille plus que bien en ce moment en France…
RBT : Et y a un super groupe français qui s’appelle Soul Sonics aussi… Sinon vous aimez les Jolly Boys et Kobo Town ?
Fab : Ouais
Tony : Kobo Town je connais mais pas l’autre… Kobo Town c’est bien carrément…
Fab : Par contre Jolly Boys en mode seconde jeunesse j’ai pas trop été saisi… Mais Kobo Town c’est super ouais….
RBT : Jolly Boys Tony c’est des vieux de la vieille qui se sont rendus célèbres dernièrement avec une reprise de « Rehab » d’Amy Winehouse…
Tony : Ah ok…
RBT : Là comme ça tout de suite, si vous deviez nous conseiller trois disques pour découvrir le calypso et le mento, vous diriez quoi ?
Fab : Alors « Mento Madness », le premier album de King Sparrow sur Cook, les premiers albums de Lord Kitchener sur Melodisc et les compiles Frémeaux pardi !
RBT : Le premier de Lord Creator ?
Fab : Ouais aussi
Tony : C’est lequel ? « Don’t stay out late” ?
Fab : « Jamaïca Time » plutôt…
RBT : « Jamaïca Time” ouais…
Fab : Merveilleuse reprise de « Jamaïca Farewell »…
RBT : Et pour finir, quels sont les projets de King Pépe & His Calypso Combo dans les mois qui viennent ?
Tony : Là on a prévu une résidence et des live en septet… On va jouer à Rennes le 28 Août sur la grande place de la mairie pour Transat en Ville. Mais rien encore dans l’est… Un second teaser va sortir. Un mélange d’interview et de live. Filmé au concert du 17 mai à Art Rock… Et la sortie du vinyle 12 titres en prévue en septembre en France
Fab : On fait notre démarchage avec notre bookeuse…
RBT : Ah oui c’est bien ce qu’il me semblait pour le vinyle… Et vous allez pas tourner aux USA ? Avec Lord Mike ? Ou en Allemagne avec Lord Mouse ?
Fab : Haha ! Déjà on va essayer de faire des plateaux communs avec Jim Murple…
Tony : Les States pourquoi pas…
Fab : C’est encore frais…
RBT : Ben avec Jump Up ça peut se monter une tournée là-bas… Enfin j’dis ça j’dis rien…
Tony : Carrément ! Mais c’est vrai que la sortie d’un album avec une distribution demande pas mal de travail pour une autoproduction.
Fab : Et on n’en a pas encore discuté avec Chuck…
Tony : Avant d’aller aux States, je passerai bien voir Lord Mouse en Allemagne ouais…
RBT : Et question de la fin… Vous en pensez quoi de « Hi Fi Calypso » de Karl Zéro ?
Fab : Ben si tu veux tu peux juste garder le dernier mot… C’est pourtant fais avec les Wailers c’est ça ?
RBT : Avec les Wailers ouais… Faut bien payer les impôts…
Fab : Nan franchement je ne l’ai pas dans ma discothèque. Bouh !
RBT : En tout cas merci d’avoir répondu à nos questions, et j’espère à bientôt sur la route !
Fab : Mille merci(s) à toi et à Rude Boy Train.