RUDE BOY TRAIN’S CLASSICS – SQUARE ROOTS – Square Roots (1995/Beach Recordings)
« Rude Boy Train’s Classics« , c’est une série de chroniques d’albums qui ont marqué l’histoire du ska, du rocksteady ou du skinhead reggae. Standards objectifs reconnus par le monde entier ou chefs d’oeuvre personnels qui hantent nos jardins secrets, la rédac de Rude Boy Train vous fait découvrir ou redécouvrir ces albums majeurs qui méritent d’avoir une place de choix sur vos étagères ! Rendez-vous le premier vendredi de chaque mois ».
UN PEU (BEAUCOUP) D’HISTOIRE: C’est en 1983 que démarre l’aventure SQUARE ROOTS, en Californie, à l’époque où les groupes de ska US se comptent sur les doigts d’un main (ou presque). Et on en sait finalement assez peu sur cette fine équipe de Santa Cruz qu’on a découverte en France il y a très longtemps grâce aux indispensables cassettes de Manu « Let’s Skank » Jaussely et à « We Don’t Skare », la compilation 100 % pur ska éditée en 1994 par le Silence De La Rue. Et attention, les Square Roots de Californie ne doivent pas être confondus avec les Français plutôt branchés reggae.
Billy Pitrone a tenu le rôle de batteur et de chanteur du combo, et avec Chris Sandman à la basse et Jon Abrams à la gratte, ils ont composé quasiment tout le répertoire. Aux dernière nouvelles, Pitrone serait aujourd’hui musicien de bluegrass.
Les Square Roots ne sortent leur premier disque qu’en 1993, et il s’agit d’un maxi Ep, « Snacks », publié par l’obscur Pocket Lint Records. En 94 et 95, le groupe est sur plusieurs compiles, notamment la méga « Spawn Of Skarmageddon » de Moon Record, avec dessus à peu près tout ce qui se faisait de meilleur sur la scène US de l’époque.
Le seul véritable album du groupe, éponyme, sortira la même année sur Beach Recordings. Mais ce fut leur chant du cygne, malheureusement.
LE DISQUE: SQUARE ROOTS au début des 90’s, c’était un peu la réponse américaine à No Sports ou aux Braces en Allemagne. La scène revival n’était pas réservée aux Teutons !
Et on allait vite le comprendre avec cet album tardif, mais ô combien indispensable. Car dès le premier morceau, on sait qu’on est en face de quelque chose de grand. « Program Zero » se répand dans nos oreilles à grand coup d’onomatopées, et avec des riffs de cuivres qui personnellement me marquèrent à jamais. C’est puissant, c’est précis, c’est incisif et c’est surtout très dansant. En bon fan de la scène allemande, je ne pouvais qu’avoir un début d’érection. Et 23 ans après, je considère toujours « Program Zero » comme l’un des grands morceaux de cette période de l’histoire du ska.
Et ce hit absolu était plutôt très bien accompagné, par « Make It Home » par exemple, qui juste derrière venait promener sa nonchalance un peu plus mid-tempo avec une redoutable efficacité, et toujours une section cuivres puissante qui fut l’une des marques du combo. En embuscade, « Waiting For My Ships » faisait l’effet de petite bombinette imparable, avec son refrain fédérateur, sa… section cuivres monumentale, et son solo de guitare propre et net comme chez Joe Satriani. Franchement, deux décennies plus tard ça n’a pas pris une ride.
On applaudira aussi des deux mains à l’écoute de « Rude Boys », sautillante et en même temps plutôt calme, de la très originale « Kali Man » aux accents reggae, ou de « Let’s Face It » qui d’une certaine manière rappelait les élucubrations de Mark Foggo, leur contemporain de l’autre côté du monde.
Et puis forcément, il y a « Premonition », chef d’oeuvre de ska revival, avec sa rythmique métronomique, son chant parfait et sa montée progressive vers un refrain apocalyptique, suivi encore une fois par une guitare solo tout simplement magistrale. C’est assez incroyable de constater à quel point ça tient encore la route, même si la production de l’époque, reconnaissons-le, n’était pas gigantesque.
Square Roots a disparu sans crier gare, pile au moment où le ska allait exploser à la face de l’Amérique. Il restera dans l’histoire comme une référence absolue pour tous ceux qui aiment quand ça avance vite, quand c’est nappé de sifflements de claviers et qu’il y a derrière comme une armée de cuivres qui veut se faire aussi puissante que les trompettes de Jéricho.
Vince