RUDE BOY TRAIN’S CLASSICS – THE BUSTERS – Stompede (Mambo Music/Sony-1996)
« Rude Boy Train’s Classics », c’est une série de chroniques d’albums qui ont marqué l’histoire du ska, du rocksteady ou du skinhead reggae. Standards objectifs reconnus par le monde entier ou chefs d’oeuvre personnels qui hantent nos jardins secrets, la rédac’ de Rude Boy Train vous fait découvrir ou redécouvrir ces albums majeurs qui méritent d’avoir une place de choix sur vos étagères ! Rendez-vous le premier vendredi de chaque mois…
UN PEU (BEAUCOUP) D’HISTOIRE: C’est du côté de Wiesloch, dans le land du Bade-Wurtemberg, que THE BUSTERS voit le jour en l’an de grâce 1987. Au départ, The Busters c’est : Thomas Scholz et Klaus Huber au chant, Max Grittner à la basse, Hans-Jorg Fischer et Peter Quintern au sax, Jan-Hinrich Brahms au trombone, Hardy Appich à la trompette, Martin Keller à la guitare, Jesse Gunther aux percus, Markus Schramhauser et Stephan Keller aux claviers, ainsi que Gunther Hecker à la batterie. Douze musiciens donc, dont deux chanteurs, deux saxophonistes, deux claviers et un batteur + un percussionniste !
Le groupe ne perd pas de temps, et dès 1988 sort le premier album, « Ruder Than Rude », sur Weserlabel. Le disque est distribué l’année suivante en France via Bondage Records et le groupe se taille une solide réputation. A l’époque, le ska est un genre assez peu pratiqué, et en Allemagne, The Busters fait figure de quasi pionnier, même si d’autres formations teutonnes lui emboîteront rapidement le pas. Le mur de Berlin s’effondre en 1989, et The Busters tourne à travers l’Allemagne avec Bad Manners, s’arrête au London International Ska Festival, et sort un second album, « Couch Potatoes », sur le même label et avec un invité de prestige : Laurel Aitken.
En 1991, le combo part en tournée aux Etats-Unis, et en ramène notamment l’excellente « Illinois State Police » qui figure sur leur nouvel opus, « Dead Or Alive », qui sort dans la foulée sur Weserlabel. On a même droit à des dates françaises, notamment avec The Toasters qui viennent de sortir « New York Fever » (aaaaaahhhh, cette énorme date à Nancy !).
Les disques vont alors s’enchainer : « Cheap Thrills », leur premier live en 92, « Sexy Money », dernier album de Thomas Scholz (qui se consacrera à temps plein à l’organisation de concerts avec Booby Trap) en 94, un excellent « Live In Monteux », bien supérieur à « Cheap Thrills », en 95, avec un nouveau venu au chant, Markus Sprengler.
En 96, The Busters enregistre son cinquième album studio, « Stompede » pour Sony Music, et en 1997, ils publient « Boost Best », un best-of pour fêter leurs dix ans, mais avec des titres entièrement réenregistrés. En 98 sort « Make A Move » sur Dogsteady Records, puis en 99 « Welcome To Busterland ». The Busters est décidément un groupe prolifique.
En 2000, Klaus, l’une des figures de proue du combo, quitte The Busters, presque aussitôt remplacé par Richard Tabor. Max, le bassiste et principal compositeur cède lui aussi sa place. En 2001 est publié « 360° », avec Dr Ring Ding et Farin Urlaub (Die Artze) en featuring, et le groupe rencontre un très gros succès en tournée.
En 2002 sort sur Pork Pie Records un live supplémentaire, enregistré pour le concert des quinze ans à Wiesloch l’année précédente. Markus quitte ensuite le combo. « Revolution Rock » en 2004 sur Ska Evolution Records (leur propre label), puis « Evolution Pop » en 2005 , suivi par « Double Penetration en 2007 et « Waking The Dead » en 2009 complètent la discographie des Busters. Ron Marsman a rejoint Richard au chant en 2008, mais ce dernier s’en va après « Waking The Dead », suivi par les deux sax d’origine, Peter et Hans-Jorg. Mathias Demmer rejoint The Busters au sax ténor, et le groupe enregistre un DVD live en 2010, « Das Konzert für die Ewigkeit » (qui sort en 2011), avant d’aller jouer en Amérique du sud à l’invitation de leurs potes de Desorden Publico l’année suivante.
Début 2013, The Busters publie « Songbook vol 1″ pour son vingt-cinquième anniversaire, un livre regroupant les accords et les textes de cent des meilleurs morceaux de sa carrière, ainsi qu’un tas de photos, et il organise dans la foulée une grosse tournée allemande avec Dr Ring Ding au trombone et au chant additionnel.
Même que Dr Ring Ding devient officiellement le second chanteur du groupe en 2014, et qu’il est bel et bien présent en tant que membre à part entière sur « Supersonic Eskalator », le treizième (et superbe) album sorti à la fin de la même année.
Un quart de siècle après ses débuts, The Busters avait légèrement perdu de sa superbe à force de changements de line-up, mais les derniers albums étaient très recommandables, et « Straight Ahead », dernière livraison du groupe il y a un an et demi, est tout simplement magistral.
LE DISQUE: Vous prendrez bien encore une rasade de Busters ? Nous on ne se lasse pas tant la carrière du plus ancien groupe allemand est prodigieuse.
Avec ce cinquième album, le premier sans Thomas au chant, et le premier avec Markus pour le remplacer (toujours en duo avec le grand Klaus Huber), les Busters remettaient l’église au village après un « Sexy Money » un peu en demi-teinte (malgré quelques hits). Dès l’entame, on sait qu’on est sur un album des gars de Wiesloch avec « Skank Down », peut-être leur chanson la plus rapide, 100 % uptempo revival et évidente invitation à la danse. On constate d’emblée que ça va être du lourd, et on ne va pas être déçu. « I don’t like yor music », légèrement moins rapide, mais tout aussi énergique, fait dans le mélange ska/manbo, et ça n’est pas pour me déplaire tant c’est carré, mélodieux, et rythmiquement aussi travaillé qu’impeccablement interprété par un équipe qui maîtrise son sujet et A à Z.
Il y a beaucoup de gaieté sur « Behind Your Door » et sur la bien nommée « Smile » (quelle beauté), de l’entrain sur une « Stompede » dans la pure tradition des Busters qu’on adore, avec un Klaus Huber des grands jours (à mon avis le meilleurs chanteur qu’ait eu le combo). La plus traînante « Skank My Blues Away » se fait remarquer dès la première écoute quand « She’s Too Busy » repart à fond la caisse sans jamais se prendre les panards dans le tapis.
Sur cet album, on apprécie aussi les reprises : d’abord « Ubangi Stomp », standard de Charles Underwood popularisé notamment par les Stray Cats, que le groupe allemand adapte ici à merveille en gros ska qui tabasse, ensuite « Friday On My Mind » des mods australiens de The Easybeat, qui là aussi passe très bien l’épreuve de l’adaptation, avec toujours cette énorme dose d’optimisme, marque de fabrique incontestable de la fine équipe.
Quand le groupe décide de calmer le jeu et de la faire plus sixties, plus calme, plus roots, ça donne « Rosita », merveille de finesse superbement cuivrée (la section cuivres, à cette époque, était surpuissante) ou la romantique « Luana » (à pleurer tellement c’est beau !), et quand ça part à la punk, c’est pour nous envoyer dans les esgourdes un « Do Ya Thang » qui remet bien les idées en places avec son refrain apocalyptique qui confirme ce qu’on vous a dit 100 fois, et qu’on vous redira 1000 fois : The Busters est un groupe gigantesque qui a marqué l’histoire du ska, et qui n’a pas encore dit son dernier mot !
Vince