Rude Boy Train

THE EXPANDERS – Hustling Culture – Easy Star Records

UN PEU D’HISTOIRE : S’il y a bien un groupe « strictly reggae » qui méritait une incartade de Rude Boy Train, c’est bien ces Expanders. D’abord parce qu’au line-up de ce groupe né en 2003, il n’y a que des activistes de la scène californienne, toutes musiques jamaïcaines confondues : Devin Morisson, le lead vocal et guitariste, exerce par exemple aussi avec The Lions alors que  le bassiste Chiquis Lozoya fricote avec Brian Dixon et ses Volcanos, le « studio’s band » monté notamment pour l’enregistrement du futur Jr Thomas.

Ensuite et surtout parce que ces gars là nous proposent un reggae bien vintage inspiré des années 70, la belle période des trios vocaux comme les Wailers, les Congos ou encore les Viceroys qui devrait faire frémir vos mémoires de rude boys.
Avec une idée très précise du son qu’ils veulent produire, ils mettent près de 4 ans à finaliser leur premier album. L’éponyme « The Expanders », enregistré et mixé par Jay Bonner, bassiste originel des Aggrolites, sort en 2010 et met une sacré claque : Les harmonies vocales ciselées, les rythmiques tour à tour légères ou dubbées… Tout est parfait sur ce premier skeud, comme les merveilles que sont « Moving Along » ou encore « Merciless Deeds ».

Ils tournent alors un peu partout sur la côte ouest, tout en s’accordant des belles participations en tant que backing band de quelques légendes comme Alton Ellis, les Ethiopians ou les Wailing Souls.
En 2012, ils offrent à leurs fans « Old Time Something Come Again », un album gratuit (toujours dispo sur la page download de leur site… je ne saurais trop vous le conseiller !) de 13 titres de reprises plus ou moins obscures du répertoire de grands noms jamaïcains, mixé par un autre Aggrolites en la personne de Roger Rivas pour un nouveau superbe moment de reggae, qui sortira un peu plus tard en version vinyle chez Jump Up.

Et voici donc qu’en cette fin de mois de juin 2015 sort ce « Hustling Culture », tout habillé d’un joli digipack (la version vinyle restant à l’état de précommande pour l’instant) sur le label incontournable du reggae aux US, Easy Star Records.

LE DISQUE : Il n’y a qu’à écouter le morceau-titre qui ouvre cet album pour apprécier la beauté du travail des Expanders : après son intro quasi soul, ce « Hustling Culture » sonne comme s’il avait 40 ans, la rythmique est digne des frères Barrett période Wailers… Tout baigne là-dedans comme des glaçons dans un ti-punch, les voix s’entrelacent, les claviers sont impeccables, les gimmicks de guitares carrés et les pointes de percus finissent de relever la sauce. Sur « Uptown Set », le sifflement de l’Hammond nous ramène au doux souvenir d’un Gainbourg période reggae et son all star band avec Ansell Collins aux claviers… Un « riddim » bien lourd comme ils disent, encore une fois enluminé de parties vocales superbes. Après l’intro géniale de «People Business» on s’attendrait presque à entendre la voix de Marley alors que sur « Top Shelf », la traditionnelle chanson dédiée à la fameuse herbe qui fait rigoler, on pense Roots Radics, Sugar Minott ou Don Carlos.

Peu de titres échappent à la règle, ils nous remémorent systématiquement un grand nom, une grande époque du reggae. Mais l’ouvrage est si minutieusement tissé que les compos, tout en finesse et foisonnantes d’arrangements de percus, de rythmiques habilement overdubbées ou de gimmicks de piano parcimonieusement distillées , s’imposent comme des titres foutrement originaux, preuve en est ce « Reggae Pops » 100% instru, sorte de partouze entre grattes électriques et percus de toutes sortes qui ne cesse de me mettre en joie…

Et puis il y a ces voix à faire tomber le cul par terre n’importe quel rasta. Le travail sur ces harmonies vocales des Californiens est vraiment de première bourre comme le démontre la somptueuse intro de ce « Piece Of Love » qui s’enchaine par une sorte de mix entre un rocksteady tendance funky et reggae roots où elles tiennent en permanence le front .

Pas de débandade tout le long de ce skeud pour l’amateur de reggae que je suis, avec en conclusion plus qu’heureuse un « Thanks For Life » désarmant de simplicité où une fois n’est pas coutume, le seul Devin Morisson tient la barre. Et ce «Flesh & Bone» qui vient refermer ce superbe inventaire de tout le talent d’un groupe qui démontre que même sans cuivre et sans dreadlocks, on peut passionnément faire revivre plus de dix ans d’une musique jamaïcaine vieille de quarante en un album, un des tous meilleurs de 2015, assurément.

Bronsky

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *